L'Anses propose de classer le résorcinol comme perturbateur endocrinien. Cette substance a des effets néfastes sur la santé.

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Résorcinol : bientôt classé perturbateur endocrinien au niveau européen ?

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail propose de classer le résorcinol comme perturbateur endocrinien. Cette substance, utilisée dans certains cosmétiques, dans des médicaments et des produits alimentaires, a des effets néfastes sur la santé.

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) demande que le résorcinol soit reconnu comme perturbateur endocrinien pour la santé humaine au niveau européen. L’agence souhaite en effet inscrire cette mention dans le règlement CLP (pour classification, étiquetage et emballage des substances et des mélanges). Cette initiative vise à renforcer la protection des consommateurs face aux effets délétères de cette substance sur la fonction thyroïdienne.

Une substance omniprésente

Le résorcinol est une substance polyvalente utilisée dans divers secteurs industriels. Il permet notamment de fabriquer des pneus, des produits dérivés du caoutchouc, des colles et des résines. Mais ce n’est pas tout. « Il est aussi employé dans certains cosmétiques et soins d’hygiène (colorations pour cheveux, mascara à usage professionnel), comme antioxydant pour des produits alimentaires comme les crevettes, ou encore comme antiseptique dans la composition de certains médicaments », explique l’Anses.

Résorcinol, un perturbateur endocrinien identifié depuis 2020

Or, l’agence a « démontré que le résorcinol impacte la fonction thyroïdienne, avec des effets délétères ». Ce produit est donc bien un perturbateur endocrinien. Il correspond à la définition qu’en donne l’Organisation mondiale de la santé (OMS) : « une substance ou un mélange exogène qui altère les fonctions du système endocrinien et de ce fait induit des effets néfastes dans un organisme intact, chez sa progéniture ou au sein de (sous)populations » (lire aussi notre encadré sur les effets des perturbateurs endocriniens).

En 2020 déjà, l’Anses indiquait avoir des « preuves solides d’un effet du résorcinol sur la régulation de la concentration des hormones thyroïdiennes via l’inhibition d’une enzyme essentielle à leur biosynthèse ». Elle constatait également des effets néfastes sur la santé et notamment une « identification d’hypothyroïdies sévères lors d’observations cliniques faisant suite à une exposition médicamenteuse importante à cette substance par voie cutanée chez l’Homme (goitre, perte d’énergie, œdème généralisé, prise de poids, dépression dans certains cas) ».

Une première reconnaissance officielle

Cette même année, le Comité des États membres de l’Agence européenne des produits chimiques (European chemicals agency ou Echa), avait reconnu le résorcinol comme perturbateur endocrinien. Mais, « sans consensus pour identifier la substance comme très préoccupante », regrette l’Anses.

Depuis, le règlement CLP a évolué, ce qui « permet de proposer son classement comme perturbateur endocrinien pour la santé humaine et de reconnaître réglementairement ses propriétés de danger ».

Une classification renforcée pour protéger la santé

L’Anses propose donc une extension de la classification harmonisée du résorcinol. La substance est d’ores et déjà classée pour toxicité aiguë et toxicité sur certains organes, pour irritation cutanée et oculaire, sensibilisation cutanée et dangers pour le milieu aquatique. L’agence souhaite aussi faire apparaître la mention « Perturbateur endocrinien pour la santé humaine, catégorie 1 ». Cet ajout impliquerait une obligation d’information de l’utilisateur à travers des avertissements et des conseils de prudence.

Un règlement pour la sécurité chimique

Le règlement CLP vise, en effet, à protéger les travailleurs, les consommateurs et l’environnement des dangers des substances chimiques. Il définit « comment doivent être classés, étiquetés et emballés ces substances et mélanges », précise l’Anses. Il peut, par exemple, imposer d’informer par le biais de pictogrammes et de fiches de données de sécurité. Enfin, le règlement peut également conduire à des décisions d’interdiction ou de substitution.

Une consultation publique en cours

La proposition est actuellement en phase de consultation publique sur le site de l’Echa et ce, jusqu’au 21 mars 2025. Cette étape permet aux parties prenantes de commenter et d’apporter des informations complémentaires. L’Anses répondra ensuite aux commentaires reçus.

Puis, le Comité d’évaluation des risques de l’Echa analysera le dossier dans sa globalité pour rendre un avis. La Commission européenne pourra alors, à son tour, élaborer les textes réglementaires pour inclure cette classification dans le règlement CLP.

© CIEM / Léa Vandeputte