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Les recettes d’une alimentation durable

L’agriculture génère un tiers des émissions mondiales de CO2. Heureusement, des solutions existent pour réduire cet impact, notamment en transformant en profondeur notre système alimentaire. Découvrez comment, à petits pas, modifier le contenu de nos assiettes peut sauver la planète.

Pollution de l’air et des sols, diminution des ressources en eau, déclin de la biodiversité… le contenu de nos assiettes a plus d’impact sur le réchauffement climatique que les secteurs des transports ou de l’habitat. En France, l’alimentation représente à elle seule 36 % des émissions de gaz à effet de serre. Face à la montée en puissance des préoccupations environnementales, l’alimentation durable séduit de plus en plus les consommateurs. Et pour cause : bénéfique pour la planète, elle l’est aussi pour la santé. Les pathologies liées à une mauvaise alimentation, comme l’obésité, le diabète ou les maladies cardiovasculaires, sont responsables d’un décès sur cinq dans le monde. Aujourd’hui plus que jamais, consommer sain, local et éthique est une priorité. Une tendance que la crise sanitaire n’a fait que renforcer. D’après une enquête Ifop réalisée en avril 2020, 82 % des Français déclaraient vouloir continuer à acheter plus de produits locaux après la crise. Pour autant, changer ses habitudes alimentaires peut vite devenir un parcours du combattant. Suivez nos pistes pour adopter les bons réflexes.

Stop au gaspillage alimentaire

C’est l’objectif numéro 1 de la loi Garot adoptée le 11 février 2016. Elle contraint les magasins alimentaires de plus de 400 m2 à donner leurs invendus à une association caritative et leur interdit de « rendre impropres à la consommation des invendus encore consommables ». En 2018, cette loi a été étendue à la restauration collective et à l’industrie agroalimentaire. Objectif d’ici 2025 : diviser par deux le gaspillage alimentaire, estimé aujourd’hui à 10 millions de tonnes par an selon l’Agence de la transition écologique (Ademe). À l’échelle individuelle, la chasse au gaspillage passe par des actions simples : établir une liste de courses, planifier ses menus, acheter en vrac, respecter la chaîne du froid, mais aussi cuisiner (et congeler) les restes ou pratiquer le compostage. La tendance culinaire qui a tout bon : le batch cooking, un terme anglo-saxon pour décrire l’art de cuisiner ses repas à l’avance. Le principe : on lave, épluche et découpe les légumes dès le retour du marché, on précuit certains aliments (céréales, pommes de terre, légumineuses, etc.), on mitonne sauces, condiments, marinades pour la viande ou le poisson. Les préparations sont ensuite conservées hermétiquement au frigo, il ne reste plus qu’à les assembler le moment venu.

Tous locavores !

Le saviez-vous ? Un aliment hors saison et importé détient une empreinte carbone 10 fois supérieure à un produit local et de saison. Adopter une attitude écoresponsable, c’est donc dire adieu aux fraises et tomates en hiver. Contrepied à la grande distribution, le locavorisme est en plein essor. Quèsaco ? Il s’agit de s’approvisionner uniquement dans un rayon de 150 à 250 km, avec des produits issus de l’agriculture raisonnée, durable et biologique, bien meilleurs pour la santé… et le portefeuille. Mission impossible ? Non grâce aux associations pour le maintien d’une agriculture paysanne ou de proximité (Amap). Nées il y a vingt ans, il en existe plus de 2 000 dans l’Hexagone, comptant quelque 250 000 adhérents. Elles permettent aux consommateurs de bénéficier de produits frais, locaux et de saison à un prix juste et aux paysans d’avoir l’assurance d’écouler leur production grâce au prépaiement de leurs récoltes. Un dispositif gagnant-gagnant. Pensez aussi aux sites comme Locavor.fr et Fraisetlocal.fr qui répertorient les bonnes adresses près de chez vous.

La viande, à dose raisonnable

Grande productrice de gaz à effet de serre, gourmande en eau, source de souffrances animales… la viande rouge, plus que tout autre aliment, est pointée du doigt pour son impact environnemental. À titre d’exemple, 1 kg de viande bovine produit 35 kg d’équivalent carbone, contre 400 grammes pour 1 kg de légumes. Côté santé, il est admis qu’une consommation excessive de viande accroît le risque de cancers et de maladies cardiovasculaires. Le Programme national nutrition santé (PNNS) préconise de se limiter à 500 grammes de viande (hors volaille) par semaine, soit l’équivalent de trois ou quatre steaks. Sans renoncer aux produits carnés, on privilégie la qualité à la quantité, avec des viandes labellisées (Label Rouge, filières raisonnée ou biologique). La bonne idée : instaurer un jour sans viande à la maison. Lancée en 2019 par des chercheurs du CNRS, l’opération Lundi Vert invite à remplacer chaque lundi la viande et le poisson. L’occasion d’explorer de nouveaux horizons culinaires. Au menu : céréales complètes et légumineuses (lentilles, riches en fer, mais aussi haricots azuki, fèves et soja), excellentes sources de protéines. Sans oublier les algues, aux qualités nutritionnelles exceptionnelles, dont la fameuse spiruline, encore plus protéinée que le bœuf, à saupoudrer généreusement sur salades et yaourts.

© C i E M / Céline Durr

Quiz : Testez vos connaissances sur le gaspillage alimentaire

1/ Quelle est la part de nourriture jetée au niveau mondial ?
a. 20 %

b. 25 %

c. 33 %

2/ Quel est l’aliment le plus gaspillé par les consommateurs ?
a. Le pain

b. Les légumes

c. Les fruits

3/ Jeter un pain rassis équivaut à :
a. Tirer une chasse d’eau

b. Prendre une douche

c. Prendre un bain

4/ La viande bio émet… de carbone que la viande traditionnelle ?
a. Moins

b. Plus

c. Autant

5/ Comment est fixée la date limite de consommation (DLC) ?
a. Par une directive européenne

b. Par l’État

c. Par le fabricant

Réponses :

1/ Réponse c : 1,3 milliard de tonnes de nourriture sont jetées chaque année soit un tiers des aliments produits sur la planète.

2/ Réponse a : les légumes représentent 31 % de la nourriture jetée.

3/ Réponse c : il faut 1 000 litres d’eau pour produire un kilo de farine, chaque baguette jetée à la poubelle correspond à une baignoire entière.

4/ Réponse c : la culture bio utilise moins d’engrais chimiques, mais nécessite plus de surface agricole.

5/ Réponse c : c’est le fabricant qui détermine la durée de conservation.

L’assiette est dans le pré

Manger mieux en soutenant les producteurs de nos régions : et si la solution passait par les projets alimentaires territoriaux (PAT) ? Issus de la loi pour l’Avenir de l’agriculture de 2014, les PAT ont pour vocation de booster l’agriculture locale. Il en existe plus de 400 en France.
Coup de projecteur sur le PAT du syndicat mixte Vendée Cœur Océan. Le projet commence en 2016 par un diagnostic auprès des restaurants collectifs. Objectif : les aider à intégrer plus de produits locaux dans leurs menus. « Nous avons également mené une grande enquête auprès des acteurs de terrain – producteurs, artisans, restaurateurs – afin de cerner les freins au développement des circuits courts », explique Katie Alleman, chargée de mission. Un état des lieux qui fait émerger une difficulté : grande région d’élevage, la Vendée manque de producteurs de fruits et légumes. La phase 2 du PAT prévoit ainsi un plan d’action pour inciter les maraîchers à s’implanter dans la région. Des actions de sensibilisation du grand public sont menées : un site internet dédié, la distribution d’un calendrier de saisonnalité et la création d’une carte interactive des points de vente à la ferme.

Rien ne se perd tout se transforme : à vos économes !

Créatrice du blog lacabane-antigaspi.com, Marie Cochard dévoile dans son livre, Les épluchures : tout ce que vous pouvez en faire, une foule d’astuces pour valoriser nos déchets végétaux. « Du trognon à la radicule en passant par les fanes et les arêtes de poissons : les détritus alimentaires sont des trésors que l’on peut recycler en cuisine, au jardin, en produits de beauté ou d’entretien. Au potager, les coquilles d’œufs pillées sont efficaces pour protéger les plants de tomates du mildiou, les peaux de banane s’avèrent excellentes pour raviver le cuir, tandis que les écorces d’orange servent d’allume-feu naturel. En cuisine, les possibilités sont infinies ! Ce qui m’amuse ? Préparer à mes invités un repas 100 % antigaspi : soupe de cosses de haricots, pesto de fenouil, quiche aux fanes de carottes et gelée de queues de cerises. C’est toujours un succès, les convives sont bluffés. »

Pour en savoir plus : Les épluchures : tout ce que vous pouvez en faire, Marie Cochard, éditions Eyrolles.

Trois questions à… Christian Rémésy

Ancien directeur de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (Inra), Christian Rémésy milite depuis 40 ans pour une nutrition équilibrée et une agriculture durable : « Le seul futur alimentaire possible », selon lui.

Vous êtes l’inventeur du concept de nutriécologie. En quoi cela consiste-t-il ?

C’est l’idée que la meilleure façon de bien se nourrir est aussi la plus efficace pour protéger l’environnement. Il est tout à fait possible de trouver un mode alimentaire satisfaisant pour l’homme et la planète. Cela suppose de repenser en profondeur la chaîne alimentaire. Je propose l’organisation d’États généraux de l’alimentation, l’implantation de ceintures de paysans autour des villes et la taxation des aliments ultratransformés comme on taxe les carburants.

Vous dénoncez les recommandations nutritionnelles officielles. Pourquoi sont-elles inefficaces ?

On ne construit pas un système alimentaire équilibré sur des arguments marketing, forcément réducteurs. Même l’injonction des cinq légumes par jour est inexacte. En réalité, il faudrait consommer quotidiennement une grande diversité de végétaux, au moins dix par jour, si possible cultivés de façon écologique dans des sols régénérés.

Et pour la viande, que préconisez-vous ?

En consommer en petite quantité, mais régulièrement. Et varier les sources de protéines animales. L’idéal : trois portions par jour. Une portion, cela peut être un œuf, un morceau de fromage ou 100 grammes de viande rouge.

Pour en savoir plus : La Nutriécologie, Christian Rémésy, Thierry Souccar Éditions, 2020.

5 applis qui changent la vie

  • Too Good To Go : l’appli star pour sauver des aliments de la poubelle. Chaque jour, récupérez les invendus des commerçants et restaurateurs autour de chez vous.
  • HopHopFood : derrière cette appli de dons alimentaires entre particuliers, une association de bénévoles lutte contre la précarité alimentaire.
  • Zéro-Gâchis : référence les produits proches de leur date limite de consommation dans les supermarchés du coin, afin de vous les proposer à prix mini.
  • Frigo Magic : vous propose des idées recettes faciles et rapides à réaliser avec vos fonds de placards et restes du réfrigérateur. Fini le manque d’inspiration en cuisine !
  • À consommer : permet de suivre les dates de péremption de vos achats, de gérer vos stocks et d’établir une liste de courses efficace.