La maladie d’Alzheimer bientôt détectée grâce à un test sanguin ?
Une étude suédoise parue en janvier met en lumière l’intérêt de mesurer le taux de protéine Tau, via un test sanguin, pour diagnostiquer la maladie d’Alzheimer. Une nouvelle donne qui pourrait faciliter un dépistage précoce.
Bientôt une révolution dans le diagnostic de la maladie d’Alzheimer ? C’est ce que laisse à penser une étude menée par des scientifiques de l’université suédoise de Göteborg relayée par la revue Jama Neurology.
À l’heure actuelle, la présence de la maladie est confirmée par différents tests de référence en plusieurs étapes. Un parcours à la fois sinueux, onéreux et douloureux pour le patient, puisqu’une ponction lombaire et un scanner TEP restent incontournables. Le résultat de cette nouvelle étude pourrait ainsi permettre de quantifier de manière plus précise et plus rapide le degré d’avancement de la maladie, donnant aux patients la possibilité d’éviter des examens lourds, et au système de santé de faire des économies. Maladie neurodégénérative encore incurable, Alzheimer touche 50 millions de personnes dans le monde, dont 900 000 en France, selon l’Inserm.
La protéine tau, la solution ?
Les plus de 65 ans représentent plus de 90 % des cas Alzheimer. Les chercheurs se sont donc concentrés sur cette population. La moyenne d’âge des participants était ainsi de 66,3 ans. Sur les 786 personnes ayant été étudiées, 64 % sont des femmes et 36 % des hommes.
L’étude s’est concentrée sur la protéine tau phosphorylée (p-tau217), présente dans les neurones : « un biomarqueur sanguin spécifique pour la pathologie de la maladie d’Alzheimer, le p-tau217 étant considéré comme ayant le plus d’utilité », explique le groupe de chercheurs dans son rapport. La présence de cette protéine avait déjà été repérée il y a plusieurs années comme un dénominateur commun aux personnes diagnostiquées, mais la fiabilité du test sanguin faisait encore débat.
Divisés en trois groupes – susceptibles, moyennement susceptibles et peu susceptibles de développer la maladie – les participants ont ainsi testé la fiabilité du test de p-tau217 développé par l’entreprise ALZpath. Q’ils aient une déficience cognitive ou non, ils ont par ailleurs été suivis grâce à plusieurs types d’imagerie médicale (IRM et TEP). Ce processus a permis aux chercheurs de confirmer qu’un « immunodosage plasmatique p-tau217 […] identifiait avec précision la maladie biologique ».
Ils concluent ainsi que leur étude « met en évidence l’efficacité d’un test de plasma p-tau217 disponible dans le commerce dans l’identification de la pathologie de la maladie d’Alzheimer ». Ils précisent que « la disponibilité des tests p-tau217 pour la recherche et l’utilisation clinique a été limitée. L’élargissement de l’accès à ce biomarqueur de la maladie d’Alzheimer très précis est crucial pour une évaluation et une mise en œuvre plus larges des tests sanguins. » Ainsi, « 80 % des individus pourraient être diagnostiqués sur la base d’un test sanguin sans aucune autre investigation ».
Vers des tests réguliers dès 50 ans ?
Une avancée saluée par la communauté scientifique. « Ces résultats montrent qu’un test sanguin peut détecter avec précision la présence des protéines qui s’accumulent dans le cerveau pour causer la maladie d’Alzheimer, se félicite le professeur de neurologie clinique anglais, Charles Marshall auprès du Science Media Center. Dans la pratique actuelle, la seule façon de prouver que quelqu’un a une construction de ces protéines dans le cerveau est d’avoir une ponction lombaire ou une TEP amyloïde. » Un enthousiasme partagé par son confrère David Curtis, professeur honoraire au Genetics Institute, University College London (UCL). Il estime que « toutes les personnes de plus de 50 ans pourraient être régulièrement dépistées tous les deux ou trois ans, à peu près de la même manière qu’elles sont maintenant dépistées pour l’hypercholestérolémie. Il est possible que les traitements actuellement disponibles pour la maladie d’Alzheimer fonctionnent mieux chez ceux qui ont été diagnostiqués tôt de cette manière ».
Un accès facilité aux dépistages pourrait permettre une meilleure prise en charge d’une maladie dont la fondation France Alzheimer estime à 225 000 le nombre de nouveaux cas chaque année. Chiffre qui pourrait doubler d’ici à 2050.
© C i E M / Mathieu Yerle