La santé va-t-elle devenir un luxe ?
Alors que le pouvoir d’achat reste l’une des préoccupations majeures des Français, le gouvernement décide de nouveaux transferts de charges vers les complémentaires santé et les assurés sociaux.
Annoncée en juin, la hausse du ticket modérateur de 30 % à 40 % sur les soins bucco-dentaires sera effective dès le 1er octobre 2023. De facto, c’est la part des dépenses restant à la charge des patients qui va augmenter de 10 %.
Cette mesure qui s’inscrit dans une logique purement comptable, va à l’inverse des objectifs de favoriser l’accès aux soins pour tous.
Pour rappel, selon l’étude 2021 de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) sur les dépenses de santé en 2020, l’Assurance maladie obligatoire prend en charge 79,8 % des dépenses de consommation de soins et de biens médicaux, les organismes complémentaires 12,3 % et le reste à charge des ménages s’élève à 6,5 %.
Pour les complémentaires santé, le coût de ce déremboursement estimé à 500 millions d’euros, vient s’ajouter à celui lié à l’élargissement du 100 % santé (voir édito du dernier numéro du Mutualiste).
Une fois encore les mutuelles sont mises à contribution et, à travers elles, leurs adhérents. Il sera en effet difficile pour les organismes complémentaires de ne pas tenir compte des conséquences des décisions de l’exécutif sur l’équilibre cotisations/prestations.
Si pour nos adhérents la mutualisation et la solidarité inhérente au modèle mutualiste pourront jouer à plein pour limiter les impacts de ces mesures, nous ne pouvons pas nous empêcher de penser aux quelque quatre millions de personnes qui ne sont pas couvertes par un contrat complémentaire santé responsable, et qui devront soit, supporter l’intégralité du reste à charge soit malheureusement, comme c’est souvent le cas, renoncer à se faire soigner.
Face à l’inégalité d’accès aux soins et aux difficultés pour les plus précaires d’acquérir une complémentaire santé, une mesure s’impose : revoir la taxation des mutuelles. Comme le soulignait le président de la FNMF lors du dernier congrès de la Mutualité française, « est-il juste que la complémentaire qui concourt à l’accès aux soins soit taxée à 14 % et un hamburger à 5 % ? N’est-elle pas un service essentiel qui doit être soumis à un taux réduit ? ». De la même manière, il conviendrait de revoir le régime fiscal des cotisations des contrats individuels, majoritairement les retraités. En effet celles-ci sont soumises à l’impôt ce qui n’est pas le cas pour les contrats collectifs d’entreprise.
Laurent Joseph, président d’uMEn