Alertée par la Confédération nationale des associations familiales catholiques (CNAFC), la Haute autorité de santé (HAS) a missionné l’Académie nationale de médecine pour constituer un groupe de travail sur l’impact de la pornographie sur les enfants et les adolescents. Ce dernier a rendu son rapport fin janvier et fait état de l’ampleur du phénomène et de ses conséquences avant d’émettre des recommandations.
🔴RAPPORT Accès à la #pornographie chez l’#enfant et l’#adolescent : conséquences et recommandations
"C’est l’avènement des nouveaux #médias et leur généralisation qui ont rendu la pornographie accessible partout, facilement et par tous"
Rapport intégral➡️https://t.co/FKw1THGN4N pic.twitter.com/7e4BembVF5— Académie de médecine de France (@acadmed) January 30, 2023
Une pornographie omniprésente
Aujourd’hui, « la pornographie est partout et surtout accessible même par des enfants en quelques clics », constate l’Académie avant d’ajouter : « Une proportion non négligeable d’enfants et un nombre important d’adolescents sont exposés (ou ont accès) à la pornographie. » Elle note cependant une différence de genre : les garçons sont encore plus concernés que les filles. D’après les études, la prévalence de l’exposition et de l’accès augmente par ailleurs rapidement avec l’âge pour atteindre un plateau en dernière année de lycée. Le fait d’avoir déjà une activité sexuelle ou une curiosité vis-à-vis de la sexualité, un accès à internet facile, un temps important passé en ligne et sur les réseaux sociaux, sont quelques-uns des facteurs qui favorisent une exposition précoce. A l’inverse, la religion, un niveau socio-économique et d’éducation plus élevé, l’attachement à l’école et de bonnes relations familiales, semblent avoir des effets protecteurs.
Des conséquences sur les représentations des jeunes
Les membres du groupe de travail notent que : « Les études tant quantitatives que qualitatives, mais également les avis d’experts, convergent pour dire que la pornographie a une influence sur la manière avec laquelle les jeunes vont appréhender leur sexualité et celle de leurs pairs. » Elle est associée « à des attitudes irréalistes au sujet de la sexualité (par exemple en termes de performances) ; à une sexualité plus permissive (par exemple en facilitant la pratique de la fellation ou de la sodomie) ; à une plus grande acceptation de la sexualité occasionnelle (avec ses retombées dommageables en termes de prévention des maladies sexuellement transmissibles et de recours à l’intervention volontaire de grossesse) ; et à une certaine maladresse dans les relations intimes à l’autre », ajoutent-ils. Elle pourrait également engendrer des conduites à risque (multiplication des partenaires, consommation d’alcool ou de drogues…). A cela s’ajoutent les nouvelles expérimentations de la sexualité sur internet et les réseaux sociaux, avec l’envoi de photos dénudées par exemple qui peuvent par la suite conduire à des situations de harcèlement.
Éduquer, réguler et contrôler
Pour protéger les plus jeunes, l’Académie nationale de médecine a émis une série de recommandations. Elle préconise notamment « de repenser l’éducation à la sexualité à l’école » et d’intégrer les parents, dans le cadre de l’éducation à la santé, afin de déconstruire les représentations et de mieux sensibiliser les jeunes aux risques liés à la pornographie. Elle souhaite aussi responsabiliser tous les acteurs de l’industrie des nouvelles technologies et faire évoluer la réglementation afin de rendre l’accès moins aisé. Elle conseille également de corriger les disparités territoriales en matière de lieux d’accueil pour les victimes (de harcèlement et cyberharcèlement notamment), de généraliser les centres de prise en charge spécialisée dans les conduites addictives et de renforcer les organismes de contrôle de la cyberpornographie. Enfin, elle veut promouvoir la recherche et mener des études de terrain afin de bénéficier de données fiables et de vérifier l’efficacité des politiques publiques.
Pour la CNAFC, qui était à l’origine de la saisie, ces recommandations vont « contribuer à ouvrir la voie à une véritable prise de conscience collective et à des mesures concrètes et déterminées pour lutter contre ce fléau, en particulier en matière d’éducation à la sexualité, de limitation des accès aux contenus pornographiques et de prise en charge des phénomènes d’addiction », explique-t-elle dans un communiqué. Elle attend maintenant que « la Haute autorité de santé reconnaisse l’exposition des mineurs à la pornographie comme un problème de santé publique ».
#communiqué
Voté le 24 janvier 2023, la CNAFC salue un rapport essentiel de l’Académie nationale de médecine pour une meilleure prise en compte de l’impact de la pornographie sur les mineurs.Les constats énoncés dans ce rapport sont accablants.https://t.co/sgnbRMDrtW
— CNAFC (@CNAFC) January 30, 2023
Vers un accès plus difficile ?
De son côté, le ministre délégué chargé du Numérique, Jean-Noël Barrot, s’est saisi du sujet. Dans un entretien donné au Parisien (réservé aux abonnés), le dimanche 5 février, il a annoncé la mise en place d’un dispositif de certification de l’âge qui permettra de bloquer l’accès aux sites pornographiques aux mineurs. Ces sites « devront s’y conformer sous peine de voir la diffusion interdite sur le territoire national », a-t-il expliqué. Les détails de ce dispositif devraient être présentés prochainement en vue d’une mise en œuvre pour le mois de septembre.
Dès 12 ans, 1 tiers de nos enfants ont déjà été exposés aux sites pornos. C'est un scandale. Voilà comment nous voulons y mettre fin. @CharlotteCaubel @le_Parisien https://t.co/hp1IbqzsLE
— Jean-Noël Barrot (@jnbarrot) February 6, 2023